La question du stress a été abordée sous de multiples angles. Elle reste très présente dans les débats si bien qu’elle peut finir par laisser indifférents voire agacer. Pourtant la réglementation et les évolutions jurisprudentielles sont là pour rappeler la responsabilité de l’employeur, à savoir identifier et prévenir les risques psychosociaux (RPS).
L’actualité pourrait laisser penser que seules les grandes entreprises sont concernées, il n’en est rien : Petites et grandes entreprises quel que soit leur secteur d’activité sont susceptibles d’être exposées à cette problématique.
Au delà du stress , que sont les risques psychosociaux ?
N’oublions pas que le stress a d’abord une fonction adaptative : il permet de s’ajuster aux contraintes de l’environnement. Un commercial qui vient de signer un gros contrat peut se sentir sous tension et c’est précisément cet état de tension qui va lui permettre d’aller chercher les moyens pour s’ajuster. Ce stress adaptatif est salutaire mais quand il est répété, ou prolongé – stress chronique -, ou encore particulièrement intense – stress post-traumatique suite par exemple à un accident du travail -, il peut s’avérait nocif. Dans ce cas, il est le résultat d’un « déséquilibre entre la perception qu’une personne a des contraintes que lui impose son environnement et la perception qu’elle a de ses propres ressources pour y faire face » ( agence européenne pour la santé et sécurité au travail)..
On sait aujourd’hui l’impact humain et économique d’un stress chronique ou d’un mal-être quelqu’en soit l’origine – professionnelle et/ou personnelle .
Les conséquences sont :
- comportementales : absentéisme, accidents du travail, désimplication, conduites addictives, conflits et violences…
- psychiques : saturation intellectuelle, difficultés de concentration, instabilité émotionnelle, angoisse, dépression…
- physiques : tensions musculaires, migraines, troubles du sommeil, troubles musculo-squelettiques, troubles cardio-vasculaires…
Les manifestations s’inscrivent selon une échelle de gravité qui va des symptômes mineurs ( signaux d’alerte) à des symptômes plus préoccupants relevant de la pathologie.
La prévention du stress et des RPS c’est intervenir suffisamment en amont pour éviter ou réduire les effets délétères sur la santé.
La prévention des RPS : agir à la source pour maintenir la santé au travail
La prévention recouvre 3 niveaux :
La prévention primaire : elle vise à agir sur les causes – organisation du travail, relations …
La prévention secondaire : elle cherche à développer les compétences individuelle et collectives pour faire face : gestion du stress et de ses émotions, gestion du temps… Elle est essentielle mais insuffisante à elle seule.
La prévention tertiaire : prendre en charge les individus ou mes collectifs en difficulté ou souffrance. C’est un versant curatif.
Ces 3 niveaux sont indissociables : cependant l’efficacité d’une politique de prévention reste la logique primaire « agir à la racine » :
- repérer les causes ou facteurs de risques
- mesurer leur impact sur les hommes et l’activité,
- identifier des actions de prévention pour réduire ce risque
Prévenir c’est donc d’abord prendre la mesure de la situation et mettre en place des actions correctives .
Des questions affluent : comment faire ? Par quel bout prendre les choses ? que faire sans ouvrir la boîte à pandore ? Nous ne voulons pas d’usine à gaz ! En parler pourrait créer des problèmes là où il n’y en a pas ? Qui associer ?…
Autant de questions qui soulignent le caractère sensible du sujet. Pourtant il est possible de progresser sur le sujet de manière plus confiante et maîtrisée dès lors que l’on se donne une méthodologie et que l’on s’inscrit dans une philosophie de petits pas.
Parmi la panoplie d’outils – diagnostics, élaboration d’indicateurs, dispositifs de traitement et d’alerte…-, le Document Unique (DU) n’a pas encore la place qu’il devrait avoir alors même que sa vocation consiste à repérer, à identifier les facteurs de risques et construire un plan de prévention.
Le document unique : un outil de repérage et d’action
Le DU n’est pas un simple document réglementaire : c’est un formidable outil de management et de pilotage de la santé et sécurité au travail. L’intégration des RPS permet de repérer les priorités en termes d’actions, et peut apporter dans un délai court de réelles améliorations dans le quotidien de travail.
Alors pourquoi ne pas s’en saisir pour en faire la clé de voûte d’un système de prévention de la sécurité et santé au travail ? Et ce d’autant plus que cette intégration peut être réalisée par l’entreprise. Mais elle suscite des questions légitimes : comment mesurer un risque qui n’est pas palpable ? comment coter ? Est-ce la même échelle et approche que les autres risques ? Comment ne pas se laisser embarquer par l’émotionnel ?…
Il faut démythifier l’intégration des RPS dans le DU : elle peut être réalisée en interne sans « investissements lourds » et permettre un dépistage et de premières actions.. Une formation apporte les repères et outils nécessaires pour conduire ce travail interne. Elle permet de s’approprier une méthodologie qui viendra s’intégrer l’approche existante en matière de risques professionnels.
Il n’est donc nul besoin d’être un expert de la question des RPS !
Les entreprises ont par conséquent entre leurs mains un outil précieux et central dans une démarche de prévention.
Au delà d’une réponse à une contrainte réglementaire de plus en plus prégnante, Qualifier les RPS dans le DU c’est assurément faire le premier pas vers une démarche de santé au travail.
Elle a, en outre, plusieurs vertus :
• Elle signifie que l’on s’intéresse aux situations de travail, c’est un acte de reconnaissance de ce qui fait le quotidien des salariés
• Elle a des effets sur le dialogue social : elle réunit les différents acteurs autour d’une problématique commune et une démarche résolument orientée action
• Elle associe les managers qui se sentent parfois démunis et leur fournit des clés d’intervention là où ils peuvent désamorcer des situations et éviter une dégradation
C’est l’occasion de resituer chacun dans son rôle : l’entreprise et les acteurs de prévention pour impulser et piloter une démarche santé au travail, les managers comme acteurs de proximité au quotidien pour prévenir et traiter, les salariés pour être en veille et pro-actifs dans la gestion de leur propre santé.
C’est un enjeu stratégique et une responsabilité individuelle et collective. La formation de l’encadrement et la sensibilisation du personnel sont certes essentiels mais gagnent en puissance s’ils s’inscrivent dans une approche globale de la prévention des risques professionnels. Le DU apporte cette perspective ainsi que des leviers opérants, et il rappelle également que la prévention n’est pas seulement l’affaire de la direction mais celles de tous ceux qui font l’entreprise.
Ghizlane EL JAOUHARI
Responsable Pôle Management et Ressources Humaines
Apave Sudeurope
Tel : 06.10.93.33.80
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