Corinne  Champagner KatzUne personne morale n’est pas ipso facto titulaire des droits de propriété intellectuelle sur les créations de ses salariés.

EN MATIERE DE DROIT D’AUTEUR

La jurisprudence est fluctuante : il y a quelques années, le contrat de travail entraînait ipso facto la cession de ses droits patrimoniaux par le salarié. Néanmoins, cette jurisprudence a évolué et la sécurité juridique impose de se référer aux textes de base.

Les dispositions du Code de la Propriété Intellectuelle, qui établissent le principe selon lequel l’existence d’un contrat de travail n’emporte pas cession des droits de l’auteur personne physique salarié, à son employeur (article L111-1 du CPI).

Bien que le contrat de travail n’ait que peu d’importance selon cet article du Code, il est tout de même opportun d’y préciser la mission du salarié en expliquant qu’il a pour fonction de créer des œuvres (design, modèles, conditionnement etc.) qui seront commercialisées et reproduites par la société.
Un contrat de cession doit donc être passé par écrit, pour l’ensemble des œuvres créées par les salariés. Cette transmission des droits doit préciser un certain nombre de mentions obligatoires, indispensables à la validité du contrat (article L.131-3 du Code de la Propriété Intellectuelle).
Une seule clause dans le contrat de travail indiquant que toutes les œuvres créées seront cédées serait inopérante, en vertu du principe de l’interdiction de la cession globale des œuvres futures.

Il est conseillé d’établir ces contrats livrant la liste exacte des œuvres créées, deux fois par an. Cette cession pourra être faite à titre onéreux ou à titre gratuit.

L’exception à ce principe : la notion d’œuvre collective.

Une œuvre est dite « collective » lorsqu’elle est créée sur l'initiative d'une personne physique ou morale qui la divulgue et la commercialise sous son nom et dans laquelle « la contribution personnelle des divers auteurs participant à son élaboration, se fond dans l'ensemble en vue duquel elle est conçue, sans qu'il soit possible d'attribuer à chacun d'eux un droit distinct sur l'ensemble réalisé » (L.113-2). « L'œuvre collective est, sauf preuve contraire, la propriété de la personne physique ou morale sous le nom de laquelle elle est divulguée. Cette personne est investie des droits de l'auteur. » (L.113-5)
En matière de logiciel, les droits patrimoniaux du salarié qui a réalisé le logiciel dans l'exercice de ses fonctions ou d'après les instructions de son employeur, sont dévolus à l'employeur qui est seul habilité à les exercer (L.113-9).

EN MATIERE DE BREVET

Les inventions faites par le salarié dans l'exécution d'un contrat de travail comportant une mission inventive qui correspond à ses fonctions effectives, appartiennent à l'employeur.
Le nom de l’inventeur, personne physique, doit cependant apparaître dans le dépôt du brevet.
Pareillement, lorsqu'une invention est faite par un salarié dans un domaine d’activité identique à celui de l'entreprise, ou « par la connaissance ou l'utilisation des techniques ou de moyens spécifiques à l'entreprise, ou de données procurées par elle », l'employeur peut se faire attribuer la propriété ou la jouissance de tout ou partie des droits attachés au brevet.

Le salarié, auteur d'une telle invention, a droit à une rémunération supplémentaire.

Cette rémunération est d’ailleurs destinée à évoluer dans le cadre de la proposition de loi n° 2288 du 5 février 2010 en faveur de la recherche et de l'innovation salariée. Les inventions de mission resteraient la propriété de l'employeur, mais la rémunération de l’auteur serait par principe proportionnelle. Ainsi l'inventeur percevrait, chaque année, pendant toute la durée de protection du brevet, « que l’inventeur soit encore présent dans l’entreprise ou qu’il ait quitté celle-ci », une part des bénéfices de l’entreprise sur l'exploitation de l'invention. L’inventeur qui utilise les moyens de l’entreprise pour une invention, dont il cèdera les droits à son employeur aura également droit à une rémunération qui pourra être réévaluée en cas de succès de l’exploitation de l’invention.


Corinne Champagner KatzCorinne CHAMPAGNER KATZ
Avocat au Barreau de Paris
Spécialiste en propriété intellectuelle

Charlotte GALICHET
Avocat au Barreau de Paris
CCK Avocats
www.champagnerkatz.com