Le groupe de sociétés est un ensemble de sociétés qui ont chacune une existence juridique propre, mais sont unies entre elles par des liens divers, principalement des liens en capital auxquels s’attachent des rapports de contrôle ou d’influence, et qui poursuivent des intérêts convergents ou communs.
La finalité du groupe est le partage des risques (de perte comme de bénéfice), la mise en commun de moyens financiers ou matériels, l’optimisation de l’emploi de ces moyens par les ressorts de l’organisation et des synergies. Le groupe est la forme supérieure de « mise en société du risque », et les liens existant entre sociétés d’un même groupe sont d’une autre nature que ceux créés par le seul contrat. Cela ne peut rester totalement sans conséquences, ni sur le plan économique (apports de fonds, augmentation de capital, prêts, avances et garanties, remontées de bénéfices etc..) ni sur le plan juridique.
Le groupe de sociétés et le droit
Tout manuel de droit des sociétés, tout exposé académique que la question du groupe intéresse commence pourtant par cette affirmation : le groupe de sociétés n’est pas un sujet de droit; il n’a pas la personnalité morale, et chacune des entités le composant est, en droit, autonome.
Ce principe est décliné à l’infini : on rappelle l’autonomie des patrimoines, le fait qu’une société mère n’est en principe pas tenue des dettes de sa filiale, ni obligée de la soutenir en toutes circonstances, l’absence de droit à procéder à des compensations entre dettes de sociétés d’un même groupe, la spécialité des procédures collectives et les restrictions mises à l’éventuelle extension de la procédure d’une société à une autre du même groupe ou à la reconnaissance de la responsabilité civile de la société mère à raison des agissements de sa filiale.
La reconnaissance du groupe auquel appartient une société peut certes créer des risques pour certaines catégories d’intérêts protégés, qu’il s’agisse de ses associés minoritaires, de ses créanciers, de son personnel, des autres sociétés du groupe et leurs actionnaires, de l’Etat pris dans sa dimension de défenseur de l’intérêt général ou simplement dans sa fonction fiscale : parce que la société peut alors devoir répondre d’autres obligations que celles qu’elle a contractées en propre.
C’est l’une des raisons qui explique la réticence du législateur et du juge à une reconnaissance pleine et entière du groupe comme entité juridique : on ne saurait sans précaution admettre que toute société membre d’un groupe doive répondre solidairement de tout engagement pris par une autre, ni que la société mère puisse disposer du patrimoine des filiales comme du sien propre.
La finalité économique du groupe de sociétés donne pourtant des indications précieuses sur le rôle juridique qu’il peut jouer : il peut et doit être reconnu positivement, et pas seulement par exception, dans les limites permises par la protection des intérêts légitimes en cause.
Cette reconnaissance peut même devenir une garantie de ces mêmes intérêts, dans certaines circonstances où la société fait défaut ou est susceptible de faire défaut à certaines de ses obligations, ou quand il s’agit d’encadrer les prérogatives de la société mère ou des dirigeants pour protéger l’intégrité de chaque entité participante.
Aussi la loi spéciale reconnaît-elle le groupe de sociétés, via la notion de contrôle qu’exerce une société sur une autre : en droit des sociétés, quand il est question du régime des participations, des conventions réglementées de l’article L 225-38 du code de commerce, de la consolidation des comptes, de l’intégration fiscale ; en droit social, par l’institution du comité de groupe, l’extension de certaines garanties au personnel de l’ensemble des sociétés « groupées », les obligations de reclassement, les plans d’épargne etc..
Outre cette reconnaissance explicite, mais partielle, du groupe, on a assisté à une sorte d’apparition oblique du groupe, à travers le traitement selon certaines règles exorbitantes du droit commun des liens de droit ou de fait pouvant exister entre sociétés. C’est notamment le cas pour ces créations légales ou jurisprudentielles qui permettent l’extension de la procédure collective d’une société à une autre ou la recherche de la responsabilité d’une infraction commise par la filiale dans le chef de la société mère, en cas de « fictivité » de l’indépendance de la seconde, de confusion des patrimoines, de direction de fait ou d’acte anormal de gestion.
Ainsi, le groupe acquiert une consistance juridique, pour deux types de raisons à la fois liées et opposées: d’une part, pour lui permettre d’accomplir sa fonction d’instance de partage des risques, d’autre part, pour l’empêcher de devenir autre chose que ce qu’il doit être en principe, l’union de personnes morales dont doit être garantie l’autonomie juridique et patrimoniale. Son existence de fait étant reconnue, certaines conséquences juridiques peuvent être tirées nonobstant l’absence de personnalité juridique. Il s’agit alors, soit d’autoriser des transferts ou des solidarités de responsabilités ou de mutualiser certaines obligations ou certaines créances, soit de préserver son caractère de réunion de personnes autonomes et d’empêcher qu’aucune partie ne soit sacrifiée à des intérêts qui, sous couvert de ceux du groupe, seraient en fait ceux de certains dirigeants ou actionnaires, ce qui amène à interdire certaines formes de prestations ou d’engagements entre membres d’un même groupe.
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