Le salarié victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle bénéficie d’une protection contre le licenciement. Les règles en la matière, d’ordre public, doivent être scrupuleusement respectées par l’employeur.
1. Champ d’application de la protection
Il résulte de l’article L. 1226-7, alinéa 1er du Code du travail que le contrat de travail du salarié victime d'un accident du travail, autre qu'un accident de trajet, ou d'une maladie professionnelle, est suspendu pendant la durée de l'arrêt de travail provoqué par l'accident ou la maladie.
Le salarié dont le contrat de travail est ainsi suspendu ne peut faire l’objet d’un licenciement, sauf cas très particuliers.
En effet, selon l’article L. 1226-9 du Code du travail, « au cours des périodes de suspension du contrat de travail, l'employeur ne peut rompre ce dernier que s'il justifie soit d'une faute grave de l'intéressé, soit de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie. »
Ces dispositions protectrices s’étendent par ailleurs à la mise à la retraite (Cass. soc. 27 janvier 2009, n° 07-45.290) ou à la rupture conventionnelle (circulaire DGT n° 2009-04 du 17 mars 2009).
2. Connaissance du caractère professionnel de l’accident ou de la maladie
Pour
Il convient de préciser que c’est au jour de la notification du licenciement qu’il faut se placer pour déterminer si l’employeur en avait connaissance.
En revanche, est nul le licenciement du salarié prononcé au cours de la suspension de son contrat de travail et qui avait transmis à l’employeur un certificat médical valant demande d'établissement de maladie professionnelle (Cass. soc. 17 janvier 2006, n° 04-41.754).
Attention : le licenciement est nul même si, au jour du licenciement, l'employeur était informé d'un refus de prise en charge par la sécurité sociale au titre du régime des accidents du travail ou des maladies professionnelles (Cass. soc. 29 juin 2011 n° 10-11.699).
3. Portée de la protection
Le licenciement prononcé en méconnaissance des règles protectrices est nul, quand bien même la procédure de licenciement aurait été engagée avant l'accident (Cass. soc. 10 mai 1995, n° 91-45.527).
En revanche, la nullité du licenciement n’est pas encourue si l'employeur a engagé la procédure de licenciement pendant la période de suspension du contrat de travail et que la notification du licenciement se situe en dehors de cette période (Cass. soc. 13 février 1996, n° 92-42.717).
La question se pose enfin de savoir comment doit être géré l’accident de travail survenant pendant le préavis de licenciement ou de démission.
Pour
4. Possibilités résiduelles de rupture du contrat de travail
Comme l’indique l’article L. 1226-9 du Code du travail, l’employeur reste libre de rompre le contrat de travail pour faute grave ou impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie.
Il est rappelé en premier lieu que « la faute grave, qui peut seule justifier une mise à pied conservatoire, est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise » (Cass. soc. 27 septembre 2007, n° 06-43867).
A titre d’exemple, commet une faute grave le salarié qui n'avait pas transmis à l'employeur les certificats médicaux de prolongation de son arrêt de travail, et n'avait pas répondu à une lettre de l’entreprise le mettant en demeure de fournir un certificat médical ou de reprendre le travail, empêchant ainsi toute explication quant à son absence (Cass. soc. 12 octobre 2011, n° 09-68.754).
Quant à l'impossibilité de maintenir le contrat de travail, ce motif doit, pour
La jurisprudence est particulièrement stricte sur le sujet.
A titre d’exemple, constitue un motif lié à l'accident du travail, la nécessité de pourvoir au remplacement définitif du salarié (Cass. soc. 23 mars 2004, n° 01-46.007).
De même, un motif économique de licenciement, aussi avéré soit-il, ne suffit pas à caractériser l'impossibilité pour l'employeur de maintenir le contrat de travail du salarié victime d'un accident du travail (Cass. soc. 7 juillet 2009, n° 08-40.885).
Il n’en va différemment qu’en cas de cessation d'activité de l'entreprise, rendant matériellement impossible la poursuite du contrat de travail du salarié (Cass. soc. 26 septembre 2007, n° 06-43.156).
5. Précisions sur la notion d’accident du travail
La notion d’accident du travail n’est pas définie par le Code du travail mais par le Code de la sécurité sociale.
Selon l’article L. 411-1 de ce Code, est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, « l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise. »
L'accident du travail est constitué même s’il résulte uniquement de faits liés au salarié, tels que geste brusque, faux mouvement, erreur de dosage dans un produit, etc.
Enfin, la protection du salarié s'applique également en cas de rechute d'un accident du travail survenu chez le même employeur (Cass. soc. 5 novembre 1991, n° 90-44.010).
6. Cas de l’accident de trajet
Il résulte de l’article L. 1226-7, alinéa 1er du Code du travail que l’accident de trajet n’ouvre droit à aucune protection particulière.
Constitue un accident de trajet « tout accident dont est victime le travailleur à l'aller ou au retour entre le lieu où s'accomplit le travail et sa résidence dans des conditions où il n'est pas encore ou n'est plus soumis aux instructions de l'employeur » (Cass. soc. 3 mars 1993, n° 88-45546).
Ainsi, le salarié ne bénéficie pas d’une protection particulière à la suite de l'accident qui s’est produit en dehors de l'horaire de travail et sur le trajet de son domicile à son lieu de travail, alors qu’il ne se trouvait pas sous la dépendance de son employeur (même arrêt).
En sens contraire, les règles protectrices s’appliquent à l'accident dont a été victime le salarié lors d'un déplacement professionnel, sur le trajet de retour d'un chantier au siège de l'entreprise dans un véhicule de l'employeur avant que ce salarié ne reprenne son véhicule personnel pour se rendre à son domicile (Cass. soc. 4 décembre 1996, n° 93-45451).
Xavier BERJOT
Avocat Associé
OCEAN AVOCATS
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