D’après les résultats de l’étude OpinionWay pour le cabinet d’audit et d’expertise comptable KPMG publiés en février 2010, 43% des PME européennes ont subi un ralentissement de leur activité à l’export du fait de l’actuelle crise économique et financière internationale, la France se hissant au premier rang des pays les plus impactés avec 58% de ses PME concernées contre 32% en Allemagne et au Royaume-Uni. Dans ce contexte difficile, seules 19% des PME françaises se sont engagées dans une stratégie de développement international contre environ 25% à l’échelle européenne.
Article rédigé par Candice TRAN DAI et Hervé GILLERON
Or, comme l’a affirmé Jean-François Roubaud, président de la CGPME, à l’occasion de la réunion de présentation de Pacte PME International en janvier 2009, «Aujourd’hui, tout le monde s’accorde à reconnaître que l’exportation constitue un vecteur de croissance incontournable pour permettre aux PME de sortir du marasme économique provoqué par la crise. »
Dans l’ensemble, les PME françaises ne semblent pas toujours considérer l’internationalisation comme un levier stratégique déterminant. En effet, le processus d’internationalisation d’une société ne se fait pas spontanément: il résulte de l’influence d’éléments déclencheurs internes ou externes à l’entreprise (Hollensen 1998).
La sensibilité du management à percevoir l’intérêt pour la société de se développer sur d’autres marchés, compte parmi les facteurs internes ; des évènements plus spécifiques comme la surproduction, mais aussi des contacts pris au travers des achats à l’importation peuvent être d’autres éléments internes contributeurs.
L’influence des facteurs externes est aussi importante ; sur un marché en croissance, la forte demande peut être une donnée qui incite à s’internationaliser. Les mouvements de la concurrence peuvent amener une entreprise à faire commerce de ses produits au-delà de ses frontières d’origine ; le benchmarking entre managers, lors des réunions de syndicats professionnels, peut générer un certain degré d’émulation.
Les principales motivations pour l’internationalisation peuvent être résumées dans le tableau ci-dessous :
Facteurs internes | Facteurs externes | |
Pro-activité | La dynamique managériale. Le produit ou la compétence unique. La différenciation par rapport à la concurrence. Les économies d’échelle par augmentation des quantités produites. |
Des opportunités sur les marchés étrangers |
Réactivité | La répartition des risques en ce qui concerne les débouchés sur les marchés. Une demande du marché qui est saisonnière ; l’internationalisation peut être une solution pour lisser le CA. |
La saturation du marché d’origine / son étroitesse. |
Source : adapté d’Albaum, Strandskov and Duerr (1998)
Ces raisons qui devraient être des leviers à l’internationalisation peuvent être insuffisantes face aux obstacles et aux freins inhérents à un processus d’ouverture vers les marchés étrangers.
En effet, parmi les PME peu ou pas internationalisées, il convient de distinguer celles qui estiment que l’internationalisation ne correspond pas forcément à leur vision stratégique et celles qui estiment que les obstacles ou les freins tant externes qu’internes demeurent trop importants voire rédhibitoires. A ce sujet, il convient de noter que la nature des obstacles ou des freins à l’internationalisation sont également fonction de la complexité de l’opération envisagée à l’international et des caractéristiques du/des marché(s) visé(s).
D’une manière générale, les principaux obstacles et freins à surmonter dans le cadre de tout processus d’internationalisation peuvent être résumés comme suit :
Facteurs internes | Facteurs externes |
Manque de capitaux propres | Niveau de l’euro par rapport au dollar |
Manque d'accompagnement | Difficulté d’accès à des financements |
Coût du processus d’internationalisation | Manque de lisibilité des dispositifs d’aide |
Taille insuffisante | Environnement juridique des marchés visés |
Connaissances insuffisantes des marchés visés et des opportunités d’affaire | Barrières tarifaires et non tarifaires sur les marchés visés |
Manque de compétences spécialisées | Difficulté à identifier des partenaires locaux |
Manque de collaboration avec les grands groupes | Absence ou insuffisance de réseaux et de relais en local |
Inadéquation de l’offre à la demande | Connaissances insuffisantes des pratiques des affaires et des différences culturelles sur les marchés visés |
Sources : Enquête CCIP-Médiamétrie (2008) ; AECM Seminar on Internationalization of SMEs (2008) ; Observatoire des PME européennes (2003)
Toute stratégie d’internationalisation nécessite donc de bien appréhender les obstacles, les freins et les risques potentiels inhérents à tout processus d’ouverture vers les marchés étrangers, qu’il s’agisse de marchés lointains ou de marchés plus proches. Il s’agit en outre de bien évaluer les forces et les faiblesses de l’entreprise face à un environnement concurrentiel exacerbé sur les marchés étrangers, en particulier sur les marchés dits « émergents », actuellement considérés à juste titre comme des marchés porteurs et prometteurs.
Malgré tout, l’ouverture à l’international demeure séduisante de part les nombreux bénéfices que l’on peut en attendre.
Comme le présente le tableau ci-dessous, les bénéfices d’une internationalisation se traduisent d’un point de vue quantitatif par un accroissement du chiffre d’affaires et/ou de la rentabilité.Par ailleurs, au niveau qualitatif, l’ouverture aux marchés extérieurs conduit l’entreprise à innover, à se remettre en question et à mieux se faire connaître.
Bénéfices | Facteurs internes ou externes | |
Aspects quantitatifs |
Le chiffre d’affaires augmente | Travail d’une équipe soudée vers un objectif commun. Prise de parts de marché. Accès à des clients internationaux. |
La rentabilité augmente | Réduction des coûts de production par effet diviseur lorsque la capacité n’est pas saturée. Effet de levier par augmentation de la capacité d’achats. |
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Aspects qualitatifs |
De l’innovation est générée | Remise en question des gammes de produits. Adaptation des produits aux nouveaux marchés. Stimulation inhérente au marché et à la concurrence. |
La réputation de l’entreprise se développe | Fierté du personnel d’appartenir à une entreprise dynamique. Promotion de l’entreprise par le personnel lui-même. L’entreprise est reconnue comme innovante et dynamique. |
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Le personnel développe une culture de l’international | Les relations avec une clientèle à l’international vont conduire le personnel à s’adapter à de nouvelles cultures et méthodes de travail. |
Le développement d’activités à l’international nécessite un travail dans la durée, avec une réelle ténacité. L’entreprise doit savoir faire preuve d’une grande humilité et d’une réelle capacité d’apprentissage et d’adaptation. Le personnel doit être également capable de changer sa façon de travailler: ce changement ne peut se faire spontanément et doit être intégré dans le plan d’internationalisation.
L’internationalisation d’une entreprise ne peut se faire que si le fondateur et l’équipe managériale s’impliquent personnellement dans cette démarche, en insufflant une véritable dynamique au sein de l’entreprise. Il est bien évident qu’il faut être absolument convaincu que ce processus est une étape stratégiquement importante pour développer l’entreprise à long terme. En outre, il ne faut pas hésiter à faire appel aux moyens proposés, par les acteurs publics et privés, dédiés à la démarche export et internationale.
Il n’en reste pas moins vrai que la forte implication du chef d’entreprise reste nécessaire pour conquérir de nouveaux marchés avec ses équipes.
Candice Tran Dai
Conseil en stratégie de développement international
Chine et Asie du Sud-est
Hervé Gilleron
Conseil et accompagnement à l’international