À quoi ressemblent, aujourd’hui en France, les entreprises qui se développent à l’international ?
Sur près de 3,65 millions d’entreprises que dénombre notre pays, on compte environ 3,6 millions de PME, dont les effectifs sont inférieurs à 250 salariés et près de 250 entreprises de taille mondiale, dont les effectifs sont supérieurs à 5 000 salariés. La France compte 40 grandes entreprises parmi les 500 premiers groupes mondiaux.
Notre pays compte un peu moins de 5 000 entreprises de taille intermédiaire (ETI) qui représentent 20 % de l’emploi salarié en France, (soit environ 3 millions de personnes) et produisent 20 % de la valeur ajoutée de la France. Elles contribuent aux exportations françaises à hauteur de 33 % (les ETI réalisant d’ailleurs 41 % de leur chiffre d’affaires à l’export) et elles représentent plus de 49 % des dépenses en recherche et développement du pays.
Le nombre des entreprises exportatrices en France représente un peu plus de 4 % du nombre total d’entreprises, contre environ 11 % en Allemagne et l’on compte en France deux fois moins d’entreprises exportatrices qu’en Italie et trois fois moins qu’en Allemagne. 10 % des exportateurs français réalisent 95 % des ventes à l’export et aujourd’hui, sur les 91 000 entreprises exportatrices, plus de 95 % sont des PME/TPE qui réalisent moins de 45 % des exportations françaises. On estime ainsi que sur 160 000 PME de 1 à 150 M € de CA, une PME sur dix exporte régulièrement (10 % exportent chaque année plus de 5 % de leur chiffre d’affaires, soit environ 16 000 entreprises). 30 % exportent très irrégulièrement (48 000 entreprises) et 70 % n’exportent pas.
Parmi les 1, 85 millions de TPE et les 674 000 entreprises artisanales que compte notre pays, un peu plus de 6 % exportent, ce qui représente environ 170 000 entreprises. 27 % d’entre elles sont constituées en société, les autres étant des entreprises individuelles et il convient de noter que la part de la valeur ajoutée des entreprises exportatrices de ce secteur représente près de 15 % de la valeur ajoutée produite par nos TPE et nos entreprises artisanales.
Les observateurs s’accordent à dire qu’une entreprise qui exporte est en général 20 % plus rentable qu’une entreprise qui n’exporte pas.
Et pourtant, comment inverser la tendance à la dégradation de notre commerce extérieur et bousculer la léthargie apparente des entreprises françaises par rapport à l’idée d’ouverture à l’international, lorsque l’on sait que seulement 55 % des entreprises de notre pays maîtrisent le transport de leurs marchandises à l’international et donc les techniques de base du commerce international.
Ce constat est renforcé par le fait que les 2/3 des entreprises françaises considèrent qu’elles doivent s’améliorer dans la maîtrise des langues et des cultures étrangères, alors que 20 % seulement des Français estiment maîtriser correctement l’anglais. N’a-t-on pas, de plus, longtemps considéré qu’un emploi sur quatre, dans notre pays, était tributaire de l’exportation et n’y aurait-il pas là un moyen de relancer l’emploi en France ?
Lorsque l’on s’intéresse à l’activité des entreprises importatrices, force est de constater que mis à part les douanes, pour des raisons de tenue des statistiques du commerce extérieur de notre pays, peu de monde s’intéresse à ces acteurs économiques ; ce qui dénote, pour le moins, d’une prise en compte partielle de la réalité actuelle du commerce extérieur de la France. C’est tout juste si l’on remarque que sur les 104 000 entreprises importatrices que compte notre pays, 68 000 comptent moins de 20 salariés et réalisent près d’1/4 des importations cumulées du pays.
Quelles sont les principales problématiques auxquelles les dirigeants de TPE et de PME sont confrontés à l’international ?
La plupart des TPE et PME françaises approchent la problématique de leur internationalisation de deux façons :
Soit de manière délibérée, parce qu’elles proposent des produits ou services de niche et sont confrontées à un marché domestique étroit ou saturé qui les contraint à aller au large pour assurer leur croissance ; ou bien parce qu’elles proposent des offres à forte valeur ajoutée, dont les débouchés se trouvent davantage à l’étranger, comme c’est le cas pour des entreprises de haute technologie, ou certaines dans les métiers de l’artisanat d’art. Enfin, plus rares sont les autres TPE ou PME qui affichent des stratégies volontaristes à l’export, pour compenser l’érosion de leurs marges sur le marché français.
Dans les faits, la grande majorité de nos PME et TPE décide encore d’exporter en réponse à des opportunités telles que des sollicitations directes d’entreprises étrangères, via internet, ou suite à des participations à des salons. D’autres répondent à des demandes qui leur sont formulées par leurs réseaux, ou grâce à des recommandations faites par des partenaires ; la dimension internationale étant généralement absente de leur réflexion stratégique, quand elles en ont une.
Pour les entreprises sous-traitantes qui se tournent vers l’international, c’est encore trop souvent sous la contrainte d’un donneur d’ordre qui produit déjà à l’étranger et qui, ne trouvant pas dans son environnement local le niveau de qualité recherché, fait pression sur ses sous-traitants français pour qu’ils le suivent dans sa migration industrielle.
En ce qui concerne les PME importatrices, c’est souvent l’absence d’alternatives compétitives en France qui les a poussées à envisager le recours à des fournisseurs étrangers.
Dans la plupart des cas, lorsqu’on évoque l’idée d’aller à l’international avec des dirigeants de TPE ou de PME, ceux-ci nous font généralement part de trois freins majeurs qui entravent leur développement :
Ces réticences concernent leur capacité à trouver seuls et rapidement des clients, des fournisseurs ou des sous-traitants ; leur aptitude à gérer de manière autonome leurs transactions commerciales avec l’étranger et enfin le dernier argument, qui n’est pas à leurs yeux le moindre, concerne la garantie des paiements, ou des livraisons conformes et de la bonne fin des transactions commerciales, dans des environnements qui ne leur sont pas familiers.
Ces notions de risques et ces difficultés sont accentuées par leur méconnaissance des contreparties commerciales et des marchés étrangers. Elles sont amplifiées par la difficulté que rencontrent ces chefs d’entreprises - généralement peu formés à l’international et souvent très absorbés par leur quotidien et manquant de temps et de ressources humaines -, à tirer partie des opportunités qui peuvent se présenter à eux.
Il faut cependant noter que peu d’enquêtes mettent en avant la question de la maîtrise des langues étrangères et de compréhension des cultures comme des freins au développement de nos entreprises à l’international, ce qui semble démontrer que ces raisons ne sont plus considérées comme rédhibitoires par nos entreprises, encore que nos PME gagneraient à renforcer leurs capacités dans ce domaine clé.
Un autre paramètre à prendre en compte et celui de la capacité financière des entreprises concernées qui devront se donner les moyens de conquérir leurs parts de marché à l’international. En effet nos entreprises ne sont pas encore toutes prêtes à l’idée d’investir dans leur développement international et plus que de ressources financières disponibles, il semble que l’idée même de payer pour se développer à l’étranger pose problème à certains chefs d’entreprises. Ne serait-ce pas là un des effets pervers d’un octroi de subvention un peu trop systématique pour pousser les entreprises à aller à l’exportation ?
Serge ROSIER
Président d’INTERNATIONAL TRADE CONNEXION
http://www.international-trade-connexion.com/