Renaud LE CHATELIEREnvironnement, commerce équitable, responsabilité sociale… Et si les réseaux sociaux facilitaient le passage à l’action ? De nombreux sites communautaires sur le développement durable voient le jour depuis quelques années et font écho aux grandes mutations d’Internet et des nouvelles générations.

Un peu d’histoire…

Le concept de développement durable est né du rapport Brundltand en 1987, lors de la Commission Mondiale sur l'Environnement et le Développement. Il est défini comme « la capacité des générations présentes à répondre à leurs besoins sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs ». Il évoque également la nécessité de lutter contre les inégalités sociales comme vecteur de pérennité. Plus communément, le développement durable (ou responsabilité sociale, lorsque l’on parle d’entreprises) est l’art de coupler trois grands domaines : l’environnement, le social et l’économique.

 

Où en est-on aujourd’hui ?

Pendant près de 30 ans, les comportements ont évolué (tri des déchets, modes de consommation alternatifs, transports doux, etc.). Mais le besoin d’échanger, de co-construire pour dépasser les initiatives individuelles, se fait de plus en plus sentir. L’intelligence collective est donc au cœur du débat : une réflexion commune devient nécessaire pour faciliter l’émergence de solutions performantes et partagées. Mais comment organiser de tels échanges, dès lors qu’ils font appel à des compétences, sujets et enjeux si vastes ?

C’est là qu’intervient le web communautaire : rendant les interactions plus simples, il est l’outil rêvé pour qui souhaite mettre la main – verte – à la pâte. Nous pouvons par exemple citer www.EcoloInfo.com, un blog d’actu écolos qui a développé une barre d’outils dédiée pour faciliter se recherches sur le net ; www.Babyloan.org, qui permet à tout un chacun de financer des micro projets dans les pays en développement (plus d’un million deux cents mille euros prêtés à ce jour), ou encore de www.Tinkuy.fr, le réseau social des éco-citoyens.

Plus qu’une simple mutation technologique, il s’agit donc d’une mutation de comportement, d’usage : chacun cherche à partager, et peut désormais trouver les éco-actions qui lui correspondent… Ou tout simplement d’en proposer de nouvelles.


Sur le plan économique

Les nouvelles structures qui ont le développement durable comme cœur de métier sont encore souvent balbutiantes et doivent trouver des business models innovants : pas question de pousser à la surconsommation pour un site de produit bio, ni d’imposer un taux d’intérêt ou de commissionnement faramineux en tant que micro créditeur…

À une autre échelle, des Directions du Développement Durable ont été mises en place dans la plupart des grandes entreprises françaises. Charge à elles de sensibiliser des collaborateurs dispersés géographiquement, pressés, et qui ne perçoivent pas toujours très bien le rôle qu’ils ont à jouer en la matière.

Ce travail de longue haleine et souvent alloué à une équipe réduite (rarement plus de 4 personnes) peut être grandement facilité par la conception de réseaux sociaux internes dédiés. Spécifique à chaque entreprise, il facilite le transfert de savoir et de bonnes pratiques, valorise les meilleurs contributeurs et simplifie le pilotage de la démarche.

Là encore, le web 2.0 ouvre donc de nouvelles opportunités : des réseaux intranet / extranet permettent désormais à certaines entreprises de partager des bonnes pratiques (en interne sur des réseaux privés ou entre entreprises sur des réseaux publics, comme par exemple sur www.SustainAtWork.fr, la communauté des pros qui agissent pour des entreprises plus responsables).


La question de l’ouverture et du dialogue

La concertation est une étape nécessaire à la diffusion du développement durable en entreprise. Ceci suppose donc un nouveau challenge : savoir dépasser les lignes hiérarchiques pour organiser un système où chacun pourrait faire valoir sa voix et son expertise, et s’enrichir de celle des autres.
Au-delà des éco-actions, nous comprenons donc que ces nouveaux enjeux (web collaboratif et dévelppement durable) touchent directement aux processus décisionnels.

Mais en entreprise, l’ouverture au dialogue est une question lourde de sens : bon nombre de dirigeants pensent que donner la parole à leurs salariés revient à donner le bâton pour se faire battre. En réalité, c’est tout le contraire : permettre les débats conduit à canaliser le risque, à identifier les attentes de ses salariés et à partager.
Là encore, il s’agit donc d’usage : les salariés parlent déjà entre eux (à la machine à café, au téléphone, etc.). Leur fournir un outil dédié permet simplement d’organiser ces échanges et d’en avoir connaissance.

Ainsi, les exemples d’intranet collaboratifs se multiplient, les facteurs clés de succès étant dans la simplicité d’utilisation, l’animation de la communauté et la valorisation de ceux qui osent prendre la parole.
SFR, par exemple, a fait le choix d’un intranet collaboratif et y a dédié toute une partie au Développement Durable.

Avec l’arrivée de la génération Y (comprenez les jeunes de 20 à 30 ans), les enjeux vont même plus loin : au delà du salaire, la priorité des jeunes arrivés sur le marché du travail est dans la cohérence entre leurs propres valeurs et celles de l’entité qui les embauche. Ils attendent également de pouvoir donner leur avis, échanger librement sans contrainte hiérarchique. Les modes de management doivent donc s’adapter à ces nouveaux pré requis pour qui veut pouvoir embaucher dans les années à venir. Au-delà de la performance qu’apporte l’intelligence collective, l’entreprise 2.0 répond donc à un défi pour l’attractivité et la fidélisation de ses talents.

Bref, les entreprises doivent dès aujourd’hui prendre culturellement le virage communautaire pour assurer leur pérennité de demain, et le développement durable reste l’un des sujets les plus évidents pour en initier la démarche.



Renaud LE CHATELIERRenaud Le Chatelier est co fondateur de Tinkuy SARL, société spécialiste en ingénierie de l’Intelligence Collective.
Expert en sensibilisation au développement durable, il interagit régulièrement avec les Directions Développement Durable de grands comptes (EDF, Bouygues, Pierre & Vacances, etc.) et les conseille sur leur stratégie.
Auparavant, il était créateur de NEOECO, un outil de sensibilisation Ludo éducatif sur le développement durable.