Pierre Alain GASCHARD

Qui ne rêve pas de trouver la formule magique qui lui permettra de maîtriser et contrôler son avenir ? L’innovation est une composante incontournable de la formule pour transformer la vision en une réalité concrète. Mais qu’est-ce que l’innovation ?

Nombreux sont ceux qui assimilent l’innovation au produit génial imaginé, conçu et mis sur le marché avant tout le monde. Certes, c’est une partie de la réponse, mais c’est insuffisant. Le mécanisme de l’innovation est à la fois simple et complexe et fait appel à un ensemble de paramètres dont certains sont maîtrisables, d’autre pas. On parle beaucoup dans les médias d’urgence innovatrice. Pourtant l’innovation a toujours existée, alors pourquoi se mettre dans cette position d’urgence aujourd’hui ?

L’urgence est liée à une nécessité d’adaptation rapide face à une situation nouvelle, cependant l’urgence peut aussi conduire à des erreurs irréversibles si on n’a pas pris un minimum de temps pour y réfléchir. Ainsi, pour comprendre le présent et envisager l’avenir, il convient de se nourrir des enseignements du passé. C’est pour cela, qu’avant de continuer cet article, je vous propose de faire un retour rapide sur le passé.

En effet, les conflits armés qui ont largement touché nos sociétés occidentales, ont nécessité une reconstruction et en conséquence généré des besoins. Les entreprises se sont adaptées et ont produit des biens pour ces marchés connus, identifiés et bien ciblés. Une fois ces marchés  alimentés, l’organisation et le dimensionnement de nos entreprises s’est orienté vers de nouvelles zones géographiques. A la fois pour continuer à produire à moindre coût, pour le renouvellement des marchés historiques, mais aussi pour équiper les nouvelles zones émergentes.

Nous vivons une période unique de l’Histoire, car aucune guerre humaine mondiale n’est venue interférée cette évolution et nous vivons en paix. Sans conflit humain notable sur la planète, c’est désormais une guerre économique qui se livre à l’échelle planétaire. Sans s’étendre sur un débat philosophique sur cette question, c’est bien de cela dont il est question aujourd’hui qui implique un positionnement différent des entreprises pour faire face et survivre. Dans ce contexte, nous sommes également confrontés à une perte de repères et nous devons intégrer un certain nombre de facteurs connus et non maîtrisables, d’où cette urgence innovatrice.

Fort de ce retour sur le passé et pour illustrer la suite cet article, prenons en compte les capacités de l’être humain.

Chaque homme est doté de cinq sens, d’un cerveau et de membres. Les sens captent l’information sur l’environnement, le cerveau l’analyse et les membres se mettent en action en conséquence. Quand tout cela fonctionne bien, nous faisons notre possible pour nous mettre dans une position de confort. Dès lors que l’une de ces capacités vient à manquer ou à disparaître, l’adaptation devient nécessaire, et c’est de cette adaptation que viendra l’innovation.

Qui ne s’est pas posé un jour la question de savoir comment il réagirait s’il perdait une de ces capacités vitales ? Certains préfèrent ne pas l’imaginer, d’autre pensent que cela peut arriver.

Naturellement nous essayons toujours d’être dans une zone connue et confortable, et le danger vient lorsque nos repères disparaissent. Mais si nous imaginons que cela puisse arriver, alors nous anticipons et prenons d’autres informations pour éviter le danger.

Notre culture, notre éducation et notre environnement façonnent notre vision et notre raisonnement mais ne refusons pas d’être aveugle car aujourd’hui le monde économique est impitoyable. Les lignes se sont déplacées et de nombreux facteurs extérieurs influencent notre fonctionnement.

Il devient plus que nécessaire d’imaginer et d’accepter les zones de danger pour innover.

Laissons émerger les idées, aussi saugrenues qu’elles puissent paraître, et mettons en place des actions qui conduiront à proposer le produit ou service attendu par le client.

Nous sommes et serons confrontés dans nos fonctionnements à des ruptures qui nécessiteront des adaptations fondamentales des organisations.

Evidemment nous ne pouvons pas tout anticiper, mais il existe des facteurs de rupture prévisibles qui sont désormais connus de tous et doivent être intégrés dans nos raisonnements. Nous ne pouvons plus les ignorer pour nos actions de développement et d’innovation.

La globalisation, le vieillissement de la population, la pénurie de matières premières, l’enjeu environnemental, le passage de la possession des biens à l’usage des biens, etc, sont des facteurs de rupture dont il faut désormais tenir compte pour le développement des entreprises.

Ce qui pourrait être considéré comme une contrainte peut devenir une formidable opportunité de croissance. Encore faut-il en avoir conscience et le savoir.

Avant toute chose, l’entreprise doit avoir conscience de la mine d’informations dont elle dispose pour les transformer en connaissances. Ces connaissances serviront la stratégie d’innovation.

Comme évoqué au travers de mes propos, la connaissance du passé est une étape préalable à la construction de l’avenir. Ne pas avoir une connaissance du passé s’est se couper du savoir.

L’innovation passe nécessairement par un état des lieux de la gestion et de la connaissance de ses clients. Il y a dans les données clients une mine d’informations précieuses à avoir et à connaître. On ne s’en préoccupe pas suffisamment et pourtant !

Prenons par exemple le vieillissement de la population comme base de raisonnement. Il est connu et reconnu que de nombreuses entreprises vont changer de main ou disparaître dans les prochaines années du fait de l’âge du dirigeant.

En étant volontairement provocateur, si parmi les clients d’une entreprise, les 20% de clients qui réalisent 80% du chiffre d’affaire sont concernées, que se passera t-il pour l’entreprise qui les fournit ? Voilà une vraie question à se poser et à anticiper, car sans l’envisager aujourd’hui on se prépare des jours difficiles demain.

Même si cela est extrême, aujourd’hui bon nombre d’entrepreneurs devrait se questionner sur les bonnes informations à détenir, car sans développer plus ici, il y a de nombreuses questions qui s’enchaînent sur ce sujet et sur d’autres.

Connaître ses clients au-delà des données classiques est un pilier fondamental de la stratégie d’innovation.

Pour conclure cet article, je citerais Edwin Herbert Land (inventeur de la photographie instantané Polaroïd) qui a dit : « Innover, ce n'est pas avoir une nouvelle idée mais arrêter d'avoir une vieille idée » auquel j’ajouterai : « Ne pas accepter d’aller vers l’inconnu et rester en zone de confort sont les ennemis de l’innovation »


Pierre Alain GASCHARDPierre-Alain GASCHARD
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