Serge THOMAS

Depuis le 1er janvier 2011, les entrepreneurs individuels, quelque soit leur secteur d'activité, peuvent opter pour un nouveau statut : l'entreprise individuelle à responsabilité limitée (EIRL).
L'EIRL repose sur deux piliers : protéger le patrimoine personnel du chef d'entreprise, pouvoir opter pour le régime de l'impôt sur les sociétés, tout en restant en entreprise individuelle … une véritable alternative à la création d'une société.

 

 

 

En quoi consiste la responsabilité limitée du chef d'entreprise ?

 

De façon très simple, la responsabilité limitée permet au chef d'entreprise de protéger son patrimoine personnel en cas de difficultés. Pour atteindre cet objectif, le législateur a créé l'EIRL et sa déclaration d'affectation du patrimoine professionnel. L'entrepreneur déclare les biens professionnels nécessaires à son activité (matériels, machines, bâtiments…). Ainsi sa responsabilité sera engagée sur cette base. Un expert-comptable ou un commissaire aux comptes (pour les biens mobiliers dont la valeur unitaire dépasse 30 000€) et un notaire (pour les biens immobiliers) seront chargés d'évaluer la valeur de ces biens.

La valeur du patrimoine affecté sera réactualisée tous les ans lorsque le dirigeant déposera ses comptes.
Le grand changement repose désormais sur le fait que l'entrepreneur devra déclarer ce qui est saisissable et non plus ce qui est protégé.

 

L'EIRL donne la possibilité de choisir son régime fiscal, pouvez-vous nous en dire plus ?

 

En effet lors de la création d'une EIRL, l'entrepreneur peut choisir son régime fiscal. Il peut soit rester à l'impôt sur le revenu (IR) soit être soumis à l'impôt sur les sociétés (IS). Le choix du régime fiscal ne doit pas se faire à la légère car la décision d'opter pour l’impôt sur les sociétés est irrévocable. D’autre part la mécanique fiscale est très différente selon que l’on choisi l’IR ou l’IS.

Concrètement, à l’IS l’imposition se décline en deux temps. En premier lieu le dirigeant paye l’impôt sur les sociétés sur les bénéfices réalisés (15% tant que le résultat est inférieur à 38 120€, 33,33% au-delà).

Dans un second temps le chef d'entreprise paye l'impôt sur le revenu sur les rémunérations et/ou les dividendes qu’il perçoit réellement.


A noter qu'opter pour l'impôt sur les sociétés, c'est aussi modifier la base de calcul des cotisations sociales qui est désormais composée :

  • de la rémunération de l'exploitant
  • des revenus de capitaux mobiliers supérieurs à 10% de la valeur du patrimoine affecté ou supérieur à 10% du bénéfice si celui-ci dépasse le patrimoine affecté

Contrairement au régime de l’impôt sur le revenu, qui soumet à impôt et cotisations sociales 100 % des bénéfices réalisés, l'impôt sur les sociétés ne soumet à l'impôt sur le revenu et aux charges sociales que les seuls revenus perçus.

 

Ce nouveau statut juridique connaît-il des limites ?

 

L'EIRL n'est pas une assurance tout risque ! La séparation des patrimoines professionnels et personnels, mesure majeure de ce nouveau statut, n'est pas toujours garantie…

Par exemple la question se pose à chaque fois que le chef d’entreprise souhaite emprunter pour financer ses investissements.

Concrètement, si le capital social ou le patrimoine professionnel affecté est trop faible, le banquier peut demander d'autres garanties. Le plus souvent, il s’agira de garanties personnelles voire le renoncement à la déclaration d'affectation du patrimoine professionnel. Dans ce schéma le dirigeant sera dans la même situation qu'un entrepreneur individuel "classique" voire, s’il à choisi l’Eurl, dans une position moins favorable puisqu'il ne pourra pas établir de déclaration d'insaisissabilité pour protéger son patrimoine immobilier et foncier.

Par ailleurs, il ne faut pas oublier que tout ce qui arrive dans l'entreprise (un client ou un salarié qui se blesse, un produit défectueux qui cause des dégâts…) est de la responsabilité du dirigeant, quel que soit le statut de l'entreprise. En cas de condamnation, il peut arriver à mettre en jeu ses biens pour payer.

D'où l'importance d’une réflexion approfondie sur les assurances à souscrire.


Le chef d'entreprise se retrouve également engagé en cas de faute de gestion. Mais attention, l'assurance couvre rarement ce type de risque.

Dernière chose, le législateur a prévu des garde-fous pour encadrer la déclaration d'affectation du patrimoine professionnel. Si le chef d entreprise surévalue la valeur de son patrimoine par rapport à la valeur réelle du bien ou à l’évaluation de l’expert, il sera personnellement responsable pendant 5 ans de ses dettes professionnelles sur la différence entre les deux valeurs.

 

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