Sophie Laurence Roy ClemandotLa procédure de sauvegarde existe depuis le 1er janvier 2006. Alors qu'elle devrait s'adresser à toutes les entreprises en difficulté pour éviter le redressement judiciaire ou la liquidation, elle a connu un succès mitigé : 509 sauvegardes en 2006, 513 en 2007 et 694 en 2008. Or en 2008, l'ensemble des jugements constatant des défaillances d'entreprises s'est élevé à 54 820.
Il est stupéfiant que les sauvegardes ne représentent qu'à peine plus de 1% de l'ensemble des défaillances. Autre élément surprenant, la sauvegarde est surtout demandée par des entreprises ayant de nombreux salariés et elle est très peu utilisée par les TPE et PME.

C’est dommage car le taux de succès des sauvegardes est très supérieur à celui des redressements dont près de 70 % se terminent en liquidation !
Outre l'élément d'échec que révèle le besoin d'une telle procédure, les réticences des chefs d'entreprise tenaient probablement au coût de la procédure, à ce qu'elle pouvait aboutir à les priver de leur pouvoir de direction et que l'échec d'une procédure de sauvegarde menait obligatoirement à la liquidation judiciaire et non pas au redressement.

L'ordonnance du 18 décembre 2008, qui s'applique depuis le 15 février 2009 a donc tenté de rendre cette procédure plus attractive :
Le dirigeant ne peut plus être évincé de la direction de l'entreprise ni même se voir contraint de céder ses parts. Le dirigeant reste donc aux commandes de l'entreprise pendant la sauvegarde et le plan de redressement et il est d'ailleurs le seul à pouvoir demander une cessation partielle d'activité.

Il peut maintenant officiellement proposer le nom de l'administrateur qu'il souhaite voir désigné ; certains tribunaux l'admettaient avant mais ce n'était pas de droit. Le chef d'entreprise peut donc aujourd'hui prendre contact préalable avec l'administrateur, négocier avec lui un forfait (1.000 Euros en moyenne pour les TPE) ou un taux horaire (170 Euros en moyenne)…
L'inventaire peut désormais être fait par le dirigeant lui-même, ce qui, là encore économise des coûts.

Pour ce qui concerne l'exploitation de l'entreprise en sauvegarde et ensuite en plan de redressement, les avantages de cette procédure sont également significatifs :
Les contrats en cours peuvent être rompus s'il apparait que la résiliation est nécessaire à la sauvegarde de l'entreprise.
Les créanciers qui bénéficient d'un gage sans dépossession ne pourront faire valoir leur droit de rétention, ni pendant la période d'observation ni pendant le plan de redressement.
Ainsi, un stock gagé reste-t-il à la disposition de l'entreprise qui peut donc utiliser son stock.

Les salariés doivent être payés par l'entreprise pendant la période d'observation et le plan de redressement mais en cas de licenciement, le coût de celui-ci est pris en charge par les AGS.
Les garants ayant consenti une sûreté personnelle ou affecté un bien en garantie peuvent se prévaloir de l'arrêt du cours des intérêts, de la suspension des poursuites et des dispositions du plan de sauvegarde et n'être donc pas recherchés personnellement par les créanciers.
Cette procédure que le gouvernement a voulu calquer sur le « Chapter 11 » américain offre donc aujourd'hui une véritable possibilité pour le chef d'entreprise de mettre en oeuvre des traitements aux difficultés sans avoir pour autant à renoncer à la direction de l'entreprise.

Elle ne reste possible que quand l'entreprise n'est pas en état de cessation des paiements et c'est pourquoi il ne faut pas hésiter à se poser la question de la sauvegarde dès les premières difficultés. Tout d'abord parce que se poser la question n'entraîne pas nécessairement une réponse positive et surtout, justement, parce qu'aujourd'hui encore, elle ne peut bénéficier qu'aux entreprises qui ne sont pas en état de cessation de paiement.