Pascal Huguenin

Depuis quelques mois ce nouveau statut a beaucoup occupé les juristes qui dissertent à l'infini sur la remise en cause de théories plus ou moins anciennes sur l'unicité du patrimoine, le patrimoine d'affectation, etc.

Plus exactement - qui est-il ? Puisqu’il s'agit ici de l'entrepreneur individuel à responsabilité limitée et de son statut.

 

 

 

Ce nouveau statut fait également couler beaucoup d'encre sur les difficultés qu'il ne manquera pas de créer en cas d'affectation de biens communs, en matière d'assiette des garanties du prêteur, en matière de droit des entreprises en difficultés, etc.

Les promoteurs du statut de l'EIRL nous ont dit avec insistance et parfois de manière pathétique vouloir éviter pour l'avenir des situations dramatiques (elles peuvent l'être effectivement) : Entrepreneurs individuels complètement ruinés à la suite de mauvaises affaires.

Il nous a encore été dit qu'il fallait absolument remédier au manque de succès rencontré par l'insaisissabilité de la résidence principale et/ou des autres immeubles ainsi que du "faible succès" de l'EURL.

Qu'apporte donc l'EIRL que ne peut apporter soit la déclaration d'insaisissabilité, soit l'EURL?

 

En ce qui concerne la première, son manque de succès ne vient sans doute pas de son formalisme relativement simple bien que nécessitant le recours à un notaire ni de son coût qui reste modéré ; alors peut être s'agit-il d'un manque d'information ?

Il semble pourtant que les différents acteurs (avocats, chambres de commerces, notaires, experts comptables,…) aient relativement bien communiqué. La vraie raison est à chercher ailleurs et sans doute dans les difficultés que l'entrepreneur individuel va connaître pour trouver du crédit si les seuls biens que le banquier regarde avec les yeux de Chimène (les immeubles) sont exclus des garanties offertes.

Qu'en sera-t-il alors de la capacité d'emprunt du même entrepreneur qui aura, par la déclaration d'affectation de son patrimoine professionnel, écarté les créanciers dont les créances sont nées à l'occasion de cet exercice professionnel de la possibilité de saisir les biens personnels (non affectés) de l'entrepreneur. Le résultat sera sans doute identique.

En ce qui concerne l'EURL, il est intéressant de se poser la question de savoir ce que le statut de l'EIRL peut apporter de plus que le recours à la personne morale de l'EURL dont il a semble-t-il été dit à toutes et à tous que le public s'en désintéressait (ce que les praticiens démentent).

En effet, pourquoi inventer un nouveau statut alors que le régime juridique de l'EURL est éprouvé et que la composition du patrimoine affecté est clairement définie (apports et acquêts sociaux). D'autre part, l'EURL apporte des solutions dans des situations où le statut de l'EIRL est impuissant, par exemple en matière de continuité successorale de l'entreprise, en évitant le risque d'indivision. Il en est de même en matière de cession de l'entreprise, et en ce qui concerne la situation du conjoint, etc.).

Effectivement, la constitution de l'EURL (SARL unipersonnelle) requiert un minimum de formalisme mais celui-ci est facilement résolu par l'ensemble des professionnels assistant l'entreprise dans ses démarches, ce pour un coût en général marginal.

En ce qui concerne l'accès au crédit, celui-ci ne sera ni plus facile ni plus difficile dans l'EURL et dans l'EIRL avec cependant un petit avantage à l'EURL puisque le patrimoine de celle-ci est "protégé" des éventuels excès de ses associés et/ou dirigeants par la relative rigidité du droit des sociétés (abus de biens sociaux, etc.), alors que rien ne viendra empêcher l'entrepreneur (l'EIRL) de prélever "sur le dos de l'entreprise" des sommes disproportionnées avec ses capacités bénéficiaires.

Le banquier dans la sagesse dont il sait parfois faire preuve ne préférera-t-il pas un statut protecteur de l'entreprise (Société) plutôt que celui protecteur de l'entrepreneur (EIRL) tout en sachant que la forme sociétaire ayant isolé les risques professionnels, l'associé verra ses biens personnels également écartés des risques d'entreprise.

La société et pour les besoins de la comparaison, l'EURL semble donc bien à la fois protéger l'entreprise et sauf garanties personnelles consenties (mais elles peuvent être limitées à un prêt spécifique), l'entrepreneur. Qui peut faire mieux ?

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