Il n'est pas rare que le dirigeant d'une société, associé majoritaire, se voit proposer par un acquéreur, le rachat total des parts de la société.

La tentation est alors grande pour le gérant d'essayer de racheter dans un premier temps à ses co-associés, leurs droits sociaux à moindre coût, puis, dans un second temps, de revendre au cessionnaire pressenti l'intégralité des droits sociaux en réalisant une très jolie plus-value.

Cette tentation est d'autant plus grande si le dirigeant de l'entreprise est le créateur de cette dernière et qu'il a des associés - famille ou amis - qui n'ont jamais participé à la réussite de la société.

Il faut résister à cette tentation.

En effet, la Cour d'Appel de DIJON dans une décision du 25 mai 2010 n° 09/00647 ISSAUTIER c/ HELIOT, vient clairement de condamner cette pratique pour réticence dolosive.

Dans cette affaire, le Président du Directoire d'une société, avait :

  1. dans un premier temps racheté les actions de l'un de ses associés,
  2. puis dans un second temps avait cédé toutes les actions de la société à un tiers pour un prix par action, six fois supérieur à celui de la première vente.

L'associé déçu a attrait le Président du Directoire devant le Tribunal de Commerce pour obtenir un complément de prix arguant de la réticence dolosive du dirigeant et de son manquement à l'obligation de loyauté et de bonne foi.

Il faisait notamment valoir que le dirigeant lui avait délibérément caché, lors de la cession de ses actions, l'existence de négociations ouvertes avec un acquéreur final, qui avait de fortes chances de se conclure et à prix par action, six fois supérieur à celui envisagé lors de cette cession.

La Cour d'Appel dit que le dirigeant s'est rendu coupable d'une réticence dolosive qui a conduit l'associé vendeur à conclure l'acte de cession à des conditions bien différentes de celles qu'il aurait acceptées s'il avait connu les négociations en cours. Elle estime que l'associé lésé avait perdu une chance de vendre ses actions à un meilleur prix et ce même s'il ne peut être affirmé qu'il aurait pu, mieux informé, céder ses actions au prix obtenu par le Groupe majoritaire.

La Cour d'Appel condamne dès lors le dirigeant à payer à l'associé déçu, un complément de prix égal à la valeur de la chance ainsi perdue.

 

Carole VERCHEYRE-GRARD

Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

83 avenue FOCH

75116 Paris

Tél 0144051996